N'ayant pas le temps de faire mon propre compte-rendu je le tire de Babelio (Fandor du 21 juillet 2019)
Avec une ambiance pesante jusqu'au bout, David Foenkinos plonge son lecteur dans la
psychologie de ses personnages. Des Deux soeurs, c'est Mathilde qui tient le rôle principal alors qu'Agathe, la soeur, intervient vraiment après une première partie entièrement consacrée à la
première citée.
Si je n'ai pas lu tout ce qu'a publié David Foenkinos, j'ai surtout adoré Charlotte
parce qu'il mettait en lumière, de façon originale, une artiste oubliée et malmenée par l'Histoire. Les Souvenirs, La délicatesse et Je vais mieux étaient davantage dans le même registre que Deux
soeurs.
Professeure de français dans un lycée parisien, Mathilde s'épanouit dans son métier
d'autant plus qu'elle vit le grand amour avec Étienne, depuis cinq ans. Au retour de vacances réussies en Croatie, elle sent que le temps se gâte : « Elle avait comme un mauvais
pressentiment. Celui d'avoir basculé dans une zone non affective ; une sorte de terrain vague qui préfigure le rejet. »
Elle qui base son enseignement sur l'étude de Flaubert et de L'Éducation sentimentale
car elle aime cette oeuvre avec passion, se retrouve en pleine tourmente quand son compagnon la quitte, une scène très pénible. Et là, tout se dégrade malgré des tentatives désespérées, demandes d'explication, supplications,
recours à une voisine psychiatre, engrenage des médicaments et autres psychotropes…
Nous faisons aussi connaissance avec l'heureuse rivale, Iris, retour d'Australie, une
fille au parcours compliqué, ex d'Étienne, mariée aux antipodes puis de nouveau en France pour récupérer « son bien ».
Si je suis plein d'empathie pour Mathilde pendant une bonne partie du livre, je la
comprends moins ensuite, cet acharnement, son travail qu'elle assume de moins en moins bien et où tout se termine très mal.
Heureusement, il y a la frangine qui reprend Mathilde en mains, la récupère chez elle
et fait tout pour lui redonner goût à la vie, ce que sa soeur supporte de plus en plus mal.
La descente, la dégringolade est bien menée, bien étudiée, l'auteur sait réserver des
surprises, des événements inattendus dans une vie bien parisienne jusqu'au coup de théâtre final qu'il n'est pas question de divulgâcher mais qui choque tout de même.
Faut-il lire "Charlotte" ? oui, oui et ENCORE OUI. N'en déplaise à certains critiques grincheux qui ne sont pas sensibles à l'émotion pure.
Quel extraordinaire roman-poème !!!
Une ode à Charlotte (Salomon) sous forme d' "Odyssée" tragique qui vous tient en haleine jusqu'à la fin.
Pour évoquer ce personnage au destin exceptionnel, il fallait une écriture exceptionnelle, une forme de vers ciselés par un orfèvre de la langue, picturale et musicale à la fois. C'est étrange au début puis cela s'impose comme une évidence. C'est rythmé, concis et fulgurant comme cette comète Charlotte qui en 26 ans a traversé notre ciel et qui a disparu, vaincue par la barbarie (toujours présente !!!) mais en laissant une oeuvre talentueuse peinte " Leben ? oder Theater ?" (Est-ce la vie ? ou du théatre ?).
Visiblement séduit par cette histoire et cette oeuvre peinte, David Foenkinos réussit à nous transmettre une passion qui submerge aussi le lecteur.
Un conseil : après la lecture, regardez sur internet certaines gouaches de Charlotte Salomon :
www.youtube.com/watch?v=PJ-TCozKQeE
Charlotte de David Foenkinos - Gallimard -220 p.- 2014 - 18,50 €